Manifeste de Bastien Sachet, CEO d’Earthworm Foundation

Que nous soyons citoyen, consommateur, salarié d’une entreprise, chef d’entreprise, agriculteur, décideur public (ou tout à la fois !), nous faisons tous le constat que la manière dont nous interagissons avec la nature, la manière dont nous produisons nos aliments, en un mot la manière dont nous envisageons ou pratiquons l’agriculture, doivent être repensées. Comme souvent, on cherche à pointer du doigt les responsables.

Il serait cependant bien injuste de faire peser la responsabilité de la dégradation des sols, les dysfonctionnements actuels des modes de production, sur l’un ou l’autre des acteurs, que ce soit les agriculteurs, les entreprises ou même l’État ou les consommateurs !

Nous avons tous bénéficié et bénéficions toujours d’un système agricole et agro-alimentaire hyper-productif qui nous a permis d’atteindre une abondance calorique, des assiettes pleines chaque jour et une alimentation bon marché. Alors, bien sûr s’indigner devant des constats négatifs est nécessaire et la prise de conscience est loin d’être superflue. Il est cependant maintenant nécessaire d’aller au-delà de l’indignation et de l’opposition des systèmes pour travailler ensemble afin de trouver des solutions qui capitalisent sur tout ce qui a été fait de bon en agriculture et saisissent l’opportunité d’innover de manière ambitieuse. Tout simplement parce que cette transition agricole et alimentaire n’est pas une guerre d’idées ou d’un type d’agriculture contre un autre : elle est un mouvement de transformation en demande de solutions pratiques et non d’idéologies, qui ne se réalisera que si les agriculteurs, les entreprises, l’État et les citoyens arrivent à travailler ensemble et à trouver ce qui crée de la valeur pour tous.

Aussi, un peu partout, des femmes et des hommes transforment déjà leur pratique de l’agriculture, tentant de prendre une direction fondamentalement différente, en ce sens qu’ils tentent de travailler AVEC la Nature et non CONTRE elle. Ils réussissent en réconciliant deux mots que tout opposerait pourtant : productivité et écologie Oui, cette transition est possible… Pour la réussir, nous pensons qu’il est essentiel de travailler sur cet élément commun qui nous réunit tous : LE SOL.

Parce qu’un sol sain, c’est de l’eau mieux filtrée et stockée,

Parce qu’un sol sain, c’est plus de biodiversité, et un moyen efficace de lutter les gaz à effet de serre en stockant du carbone.

Parce qu’un sol sain, ce sont des vers de terre qui font une partie de travail du tracteur, c’est moins de pesticides épandus et donc moins d’argent dépensé par l’agriculteur pour produire.

Parce qu’un sol sain, ce sont des plantes saines, et donc des citoyens en bonne santé.

Nous voulons des sols « vivants », par opposition à des sols en danger de « mort » : surexploités, sur-travaillés, voire délaissés par des agronomes trop occupés par les plantes, ils sont pourtant ceux qui nous portent, nous nourrissent et irriguent !

Comment ne pas s’inquiéter de la diminution du nombre de vers de terre qui est passé de de 2 tonnes par hectare dans les années 1950 à seulement 200 kg / hectare de nos jours ? Le sol est traité comme une ressource minière, dans lequel on puise gratuitement à chaque récolte, alors qu’il est une ressource renouvelable : jusqu’à quand ?

« Sols Vivants » c’est remettre le sol au centre de la filière agricole et alimentaire. Revoir les filières du champ à l’assiette dans les territoires, pour permettre la régénération du capital sol pour le bien de tous. Car l’élément TERRE, parce qu’il nous concerne tous, nous rassemble. Et, pour réussir une transition aussi ambitieuse, ce rassemblement est indispensable.

« Sols Vivants », c’est une collaboration inédite de tous ceux qui font chaîne de valeur : le CEO de l’entreprise, le chef de produit qui écoute ses consommateurs, l’acheteur, l’agriculteur, en passant par le scientifique, le décideur public, l’actionnaire et l’agronome…

Certes, chacun représente son organisation. Mais au final, ce sont bien des femmes et des hommes, des individus, qui prennent des décisions. Sols Vivants rassemble ces personnes dans les territoires qu’ils habitent pour se pencher de manière pragmatique et réaliste sur le sujet des sols, de cette agriculture qui régénère et crée des solutions qui transforment.